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Une I.A. pour apaiser le contrôle qualité dans la pharma

par Alp ICT
Christophe Martin, directeur qualité des Laboratoires Merck Serono

Dans toute usine, chaque jour, un problème survient. Mais quand il apparaît sur un site qui fabrique des médicaments contre le cancer ou la sclérose en plaque, les conséquences peuvent être catastrophiques. Afin de prendre au plus vite les bonnes décisions face à ces « déviations », Merck Serono Aubonne a développé une solution d’intelligence artificielle capable de juger de leur criticité.

Christophe Martin a roulé sa bosse. Trois pays, cinq entreprises, toujours dans la pharma. C’est en 2015 que, pour prendre la direction de l’unité qualité des laboratoires Merck Serono (179 personnes aujourd’hui), il pose ses valises à Aubonne (VD). À l’intérieur : un intérêt historique pour l’intelligence artificielle, hérité du temps où son père travaillait avec les algorithmes de décision appelés alors « systèmes experts ».

Son arrivée coïncide avec la digitalisation à marche forcée d’un secteur conservateur. « Jusqu’au milieu des années 2010, à part pour la bureautique et SAP, la pharma était encore très ‘papier’, se souvient l’ingénieur. Puis tout s’est accéléré : la numérisation de tous nos processus a généré une immense quantité de données, regroupées dans des dashboards. »

Investigation poussée, ou pas ?

Digital project manager

Un ensemble de data intéresse particulièrement le qualiticien : la description des incidents (appelés « déviations ») qui surviennent dans l’usine, de l’entrée des matières premières au stockage des produits finis. Consignées par l’ensemble des 800 salariés, ces déviations sont ensuite qualifiées par l’équipe qualité selon leur criticité. « Nous en recevons une à cinq par jour et en avons toujours une centaine en cours de traitement, explique Christophe Martin. L’impact peut être énorme, jusqu’à l’arrêt de la production. »

Problème : une déviation majeure sur deux se révèle mineure. Ceci ralentit la production et a un coût : la résolution d’une déviation majeure coûte CHF 8’000, quatre fois plus qu’une mineure, car elle implique la mise en place d’une équipe d’investigation. En février 2020, Christophe Martin embauche une apprentie de l’Idiap (institut de recherche valaisan spécialisé dans l’intelligence artificielle) via leur programme de Master IA, pour plancher sur ce sujet.

Michelle Meguep, apprentie du Master IA, qui a participé au développement du projet, se connecte à la solution d’IA

Mettre les ressources au bon endroit

Dix-huit mois plus tard, soit un an de nettoyage-étiquetage de données et le reste de codage, l’unité qualité est dotée d’une solution d’intelligence qui a appris à qualifier la criticité des déviations en fonction de leur description. « Évidemment, elle ne prend aucune décision, prévient son directeur. Mais elle limite les allers-retours entre nous et la prod’ et nous aide à décider plus vite. Nous mettons désormais nos ressources au bon endroit dans l’implémentation des mesures correctives et sommes bien plus pertinents dans nos actions préventives. » Prochaine étape : sécuriser une chaîne d’approvisionnement mise à mal par la crise du Covid avec un système similaire. 

Le partenariat Merck Serono – Idiap en 3 chiffres

  • 18 mois : c’est le temps qu’il aura fallu pour mener à bien ce projet
  • 80’000 CHF : c’est la somme investie dans ce développement
  • 15’000 heures/an : c’est le temps économisé par l’unité qualité grâce à cette solution

« Aujourd’hui, l’industrie pharmaceutique a du mal à répondre à la demande des hôpitaux. Fiabiliser notre approvisionnement en médicaments grâce à l’I.A. c’est certes augmenter notre compétitivité mais c’est aussi résoudre un problème de santé publique. » Christophe Martin, directeur qualité des Laboratoires Merck Serono

Portrait réalisé par Charles Foucault-Dumas

Les Pépites romandes du numérique

Ce projet d’IA est la 1ère Pépite romande du numérique sélectionnée par les plateformes Alp ICT, BioAlps, CleantechAlps et Micronarc qui, grâce à leur travail de terrain, découvrent chaque année des projets d’innovation remarquables mais encore peu médiatisés. La plupart du temps, il s’agit de projets au sein d’entreprises qui font appel aux technologies du numérique pour répondre à leurs besoins internes ou pour développer leurs activités.

Le terme « pépite » a été choisi en référence aux pépites d’or qui se forment dans les sources géothermales, à travers les fissures des roches dures, et donc dans des lieux difficiles d’accès. Une pépite n’est pas nécessairement connue, elle a de la valeur mais elle peut rester cachée si personne ne la cherche.

C’est pourquoi, les plateformes ont décidé de révéler ces pépites cachées, dès 2022, à travers une série de portraits mensuels. C’est un beau moyen de valoriser la dynamique de nos entreprises régionales, d’inspirer l’écosystème à innover et de rendre les technologies plus accessibles. Chaque mois, nous partageons le portrait d’une nouvelle pépite : comment le projet est-il né ? par quels moyens ? quelles ont été les défis ? quels sont les retours sur investissement ?

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