Non, votre transformation digitale ne se résume pas à ZOOM
« Le COVID a eu de meilleurs résultats sur la transformation digitale en quelques jours, que les années de change management avant lui. » Qui d’entre vous n’a pas encore entendu cette boutade ? Au risque de décevoir ceux qui pensaient avoir enfin franchi le cap ; non, la transformation digitale ne se réduit pas à organiser ses réunions sur Zoom.
Vite fait, mal fait ?
Si l’urgence a bien permis d’opérer certains changements de manière radicale, il y a fort à parier qu’ils ne le soient qu’en surface et, comme souvent dans l’urgence, mal opérés. Si les outils ont été adoptés de manière spectaculaire mais sous la contrainte, les processus de collaboration et de gestion de projet doivent eux être complètement adaptés sous peine de déstabiliser l’organisation toute entière. Les entreprises qui n’ont pas anticipé, mais subit cette évolution, vont souffrir de graves répercussions :
- Baisse de productivité liée au manque de maîtrise des outils digitaux et à leur multiplication.
- Fragilisation de la sécurité des systèmes d’informations liés au travail à distance.
- Apparition d’une nouvelle forme de stress liée à l’augmentation systématique du temps écran au détriment du temps humain. La novlangue l’a déjà baptisé la « Zoom fatigue ».
- Évolution néfaste des rapports managériaux liés à la distance et au sentiment de « perte de contrôle » : augmentation du reporting non-productif, flicage, méfiance et détérioration des relations interpersonnelles.
Dès lors, il s’agit pour les leaders d’organisations d’amorcer un travail structurant auprès des équipes. Et là, tout commence par la culture.
Le digital a sa culture
Un simple exemple : combien de fois ai-je vu des cadres s’échanger des messages au format e-mail dans un terminal de chat ? Combien de conflits sont nés d’échanges digitaux mal interprétés, car dépourvus de communication non-verbale et privés des perceptions extra-intellectuelles qu’offre habituellement une communication en face-à-face ?
Pour utiliser les outils digitaux de manière productive et durable, il faut comprendre leur fondement, leur utilité et leurs limites. Il faut appréhender un minimum ce système sous-jacent pour pouvoir les utiliser convenablement. Comprendre les fondamentaux des réseaux informatiques est par exemple un point clef pour ne pas compromettre toute l’organisation. Chaque employé en 2020 devrait par exemple savoir ce qu’est un serveur, une adresse IP, une requête, un certificat de sécurité, une clef cryptographique, une attaque brutforce, de l’ingénieurie sociale, un wifi, des protocoles AES ou TKIP, un routeur, un Single-Sign-On ou une authentification à 2 facteurs. Mais aussi et de manière plus générale, appréhender une licence d’utilisation, libre ou non, savoir utiliser des gifs ou des smileys pour donner un contexte émotionnel à ses communications binaires, connaître les touches de raccourci des différents programmes ou encore, apprendre à rechercher l’information sur les moteurs de recherche grâce à des opérateurs booléens basiques. Bref, maîtriser les grands basiques avant d’aller plus loin.
Des processus et des outils
Pour ceux qui souhaitent profiter de ce chamboulement pour augmenter leur avantage concurrentiel dans une économie aux cycles de plus en plus courts, il faudra permettre à ses équipes de développer une culture du risque et une attitude d’entrepreneurs. Ils devront apprendre à animer des ateliers de design thinking internes et utiliser les outils de prototypage comme Balsamiq ou AdobeXD pour passer d’une idée à un produit en quelques jours au lieu de plusieurs mois. Développer son agilité grâce aux méthodes issues du monde de l’IT comme la gestion de projet agile avec les méthodologies SCRUM et KANBAN et adopter des outils de gestion de projet efficaces comme Trello ou Jira. Face à la multiplication des plateformes, apprendre à automatiser le travail à faible valeur ajoutée avec des connecteurs d’API comme Zapier ou IFTTT. Développer sa capacité de collaboration à distance avec des outils comme Jamboard ou Mural ne sera bientôt plus un atout mais un pré-requis. Tout en évitant de tomber dans l’écueil du « tout outils » avant même de comprendre le besoin ou le processus sous-jacent.
Du présentiel à la performance
Au-delà du métier et à l’échelle organisationnelle, la digitalisation et le télétravail constituent des défis d’envergure pour les managers. Ils doivent passer d’une fausse sensation de contrôle apportée par le présentiel, à une vraie absence de contrôle du fait du travail à distance. Comment attribuer le travail, le mesurer et l’évaluer dans ces conditions ? Il faut pour cela passer d’une culture de la présence à une culture de la performance. Cela veut dire évaluer le travail à accomplir, donner des directives claires et mesurer la productivité. Cela passe également par mettre en place des processus et des outils pour améliorer le suivi et la collaboration.
Sans oublier la santé
L’Homme a passé des centaines de milliers d’années à gambader dans la nature ou à travailler dans les champs avant de se retrouver en moins de 100 ans, vissés 8 à 15h par jour sur une chaise devant un écran. Il est urgent de déployer de nouveaux modes de travail plus équilibrés afin de préserver la santé physique et mentale des collaborateurs. Des techniques comme Pomodoro par exemple, peuvent permettre de séquencer le travail tout en augmentant la concentration et donc la productivité. Mais les activités sportives et extra-professionnelles doivent être encouragées, voir subventionnées pour permettre de maintenir un bon niveau de performance et de soutenabilité à moyen terme.
Aux lendemains de l’épidémie, l’agilité et la résilience des entreprises sont devenus des facteurs clefs de survie, plus que de compétitivité. La transformation digitale devra être maitrisée et seules les entreprises qui embrassent ce changement avec curiosité et passion sauront pérenniser leur activité. Celles qui ambitionnent d’établir un leadership devront elles jouer une carte supplémentaire : l’audace !