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Covid-19 : réorganisation professionnelle et réflexion entre digitalisation, crise sanitaire et crise écologique

par Xavier Comtesse

Nous vivons toutes et tous une situation extra-ordinaire, et j’imagine que tout un chacun cherche à s’acclimater avec son nouvel environnement, ses outils, ses possibilités. Si l’on regarde dans le rétroviseur, c’est d’ailleurs tout simplement le propre de l’Homme : s’adapter continuellement au changement. Je vous propose cet humble partage d’experience, puissent ces quelques mots vous être utiles dans vos attributions et situations.

Comment les outils digitaux accompagnent la situation

En toute logique, mon employeur (Siemens) a émis ses recommandations, allant dans le sens du home office. C’est une pratique connue et adaptée aux activités de ma division, composée d’une 20ène de personnes réparties sur le territoire Suisse, avec à disposition les bons outils et un management averti, basé sur la confiance et le bon sens. Comme dans toute l’Europe, ce lundi 16 mars mon agenda professionnel a donc été bien revisité. Travaillant dans le développement commercial, au service de développements orientés « transition énergétique et smart infrastructure », il a fallu gérer annulation de RDV, mise en place de téléconférences, et prise en compte des nombreuses directives de tous bords. L’agenda personnel s’est lui aussi adapté, en ayant conscience que nous avons la chance de ne pas faire partie de ces milliers d’employés et directeurs, petites et moyennes entreprises et autres institutions touchées de pleins fouets. Qu’en est-il aujourd’hui, et quel est l’apport de la digitalisation dans nos activités ?

Le nouveau rythme de croisière est établi. Notre employeur, en tant que leader industriel notamment dans les solutions Smart Building, a déjà énormément dématérialisé sa propre infrastructure, rassemblant 380’000 employés. Cela m’avait d’ailleurs impressionné lors de mon embauche. Les ressources humaines ainsi qu’un grand nombre de formations sont disponibles en ligne, accompagnant notre outil de téléconférence, de chat, notre classique bureautique online, des wikis et des supports divers et variés. Nos smart cards PKI et autres VPN et méthodes de sécurisation nous permettent d’accéder à nos solutions cloud et nos serveurs, sur ordinateurs et téléphones portables. Quelques bugs et ralentissements ont eu lieu au début, mais tout est globalement revenu à la normal. A cela s’est additionné la mise en place de 6 à 7 autres plateformes de téléconférences, pour s’adapter aux clients et aux situations, accompagnant mails, chat et appels entre collègues, réunions online avec webcam et partage d’écrans, appels GSM classiques à deux ou plusieurs, groupes WhatsApp avec les amis et autres séances de Qi Gong en visio avec le groupe. Tout est plutôt bien fonctionnel, autant sur le plan professionnel que personnel. Il est aussi possible que ces prochains jours notre temps de travail soit réduit, pour être cohérents avec les divisions techniques qui elles ont du fortement ralentir, à cause de la fermeture des chantiers. On s’adapte. Aussi au niveau du quotidien transitoire de toute l’équipe, générant soit dit en passant de l’empathie et de la sympathie, voyant par exemple parfois passer les enfants durant les e-réunions. Plutôt sympa, pour la cohésion d’équipe…

J’imagine que tout cela est classique pour beaucoup d’entre nous. Et nous avons conscience que c’est une chance d’être dans un groupe qui avait déjà une infrastructure numérique fiable. 

Entre perte de productivité et réorganisation des activités

Les tâches quotidiennes se sont adaptées aux outils et ressources disponibles, aux attentes et besoins du terrain, en maintenant le cap d’objectifs recalibrés. Il y a certainement une perte de productivité via le report d’opportunités ; vue sous un autre angle, un grand nombre de déplacements sont annulés et rendez-vous transférés online. Il en résulte un grand gain de temps revalorisable. La réduction des démarches commerciales permet aussi de se reconcentrer sur d’autres actions, dites « back office », ce qui est aussi une réelle opportunité. Nous n’avons jamais autant travaillé ensemble que ces derniers jours, et avancé sur des sujets importants, souvent emportés par l’urgence du quotidien (illustration : matrice d’Eisenhower).

Dans notre cas, il s’agit donc plutôt d’un transfert de taches qu’une perte sèche de valeur. C’est une riche période de recadrage qui devrait porter ses fruits, lors d’une reprise que nous estimons pour cet automne. Vu le marathon, il est donc aussi important de garder les fils conducteurs « du terrain ». Et ce sera différent, il y aura un avant et un après Covid-19. Je parie d’ailleurs que cette nouvelle habitude de téléconférences, à mon sens sous utilisée jusqu’à maintenant pour de nombreuses raisons, restera ancrée dans nos quotidiens, réduisant nos déplacements et problèmes liés (ex : émissions de CO2) et nous libérant ainsi plus de temps utiles, avec un gain d’efficacité. Il me semble aussi que tout le monde s’écoute mieux, grâce aux capacités de l’outil (difficile de parler en même temps) ainsi que l’atmosphère globale. 

Une fois l’urgence de la crise sanitaire passée, comment aborderons-nous l’importance de la crise climatique ?

La période est peu propice à parler « transition énergétique et smart infrastructure », les priorités actuelles étant autres. Il reste cependant des fenêtres d’échanges intéressantes grâce au temps disponible pour de nombreux acteurs, étant donné la baisse générale d’activité. Et c’est aussi en période de crise qu’il convient de regarder plus lointain ; tout grand changement apporte son lot extraordinaire de développements positifs. Nous savons tous combien la crise climatique est clairement une priorité pour nos sociétés, et j’aime à penser que les retombées de la crise sanitaire vont être très constructives dans ce domaine. Pendant que le Covid-19 impacte tristement l’espèce humaine, il est important de rappeler que celle-ci, tout aussi tristement, impacte l’ensemble du fonctionnement de notre planète, faisant subir tout autant de souffrances aux autres espèces et écosystèmes. Cette analogie va faire surface, accompagnant la « vague verte » ainsi que les prises de conscience actuelles sur les forces de résilience et d’actions de nos institutions et organisations.

Sous l’angle des trois piliers du développement durable : la dernière crise économique a été gérée, et l’actuelle crise sanitaire et sociale nous rappelle que nos systèmes sont au service de l’humain (et non l’inverse). Ainsi, offrons-nous le rêve d’imaginer les mêmes efforts majeurs investis pour résoudre la crise écologique !

Pour la première fois, l’humanité, totalement interconnectée et consciente d’elle-même, regarde réellement dans la même direction. Obligée de faire face ensemble à ce « nouvel ennemi invisible et mortel », tout comme le CO2 l’est, générant lui aussi des milliers de pertes humaines et autres destructions majeures. Le Covid-19 recentre sur une certaine quête de sens et d’humanisme pour le nouveau millénaire. Cette prise de conscience doit construire l’avenir, et permettre d’investir les ressources nécessaires pour affronter les challenges de l’urgence climatique et de la durabilité. Et qui sait, peut-être que ce sera prochainement l’extraction du pétrole et du charbon que les états décideront de totalement et définitivement confiner, pour réaliser la transition énergétique souhaitée par les nouvelles générations !

Ainsi, c’est avec humilité mais conviction, avec une naïveté optimiste mais consciente, que je vous propose de voir cette situation de crise comme une opportunité pour l’avenir. Avec mes sincères et meilleurs encouragements pour nos institutions médicales et sociales, pour nos organisations politiques et milieux économiques, ainsi que pour tous les acteurs qui encaissent actuellement le choc de front. Puissent toutes et tous traverser cette tempête dans les meilleures conditions. Continuons notre vie transitoire, ensemble notamment grâce à l’Internet, et en avant pour un 21ème siècle connecté, digital, éthique, responsable, humain et durable !

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